Il était invité, le samedi 13 avril, dans l’émission de France 2 « On n’est pas couché » animée par L. Ruquier.
Bien sûr on allait l’interroger sur son rôle dans cette fameuse affaire Cahuzac. Lui, le premier flic de France, qui peut tout savoir sur tout le monde, qui est à la tête des services secrets, du contre-espionnage et dispose de « notes blanches ». Que savait-il au juste ? Rien. ( ? ! )Pourquoi ? Parce que, pour la première fois dans l’histoire, sans doute, nous avons affaire à un ministre de l’Intérieur qui n’est pas curieux… Qui a de nombreux réseaux et des amis de plus de trente ans, bien placés, mais qu’il ne sollicite pas. Au nom de quoi ? De la séparation des pouvoirs. En effet, seule la justice, lorsqu’elle est saisie peut mener une enquête. Aucune enquête parallèle ne peut donc être diligentée.
Bref, nous étions chez Manu et les Bisounours. Du grand art ! Car Manu ne se démonte jamais. On lui donnerait presque le Bon Dieu sans confession. En voilà un qui n’a pas besoin de prendre des cours de communication. Ou bien qui en a trop pris ? Tellement, toutes les questions glissent sur lui. L’expression est concise et maîtrisée. Les affects, bien que n’étant pas absents, sont contrôlés. Il se dégage même de son visage, encore poupin, un je ne sais quoi de candeur qui fait qu’on aimerait bien le croire.
Même, Guy Bedos, présent ce soir là, et qui « tuerait père et mère » pour un bon mot semblait sous le charme. Même celui qui, en forme de boutade, dit préférer « les ministres de l’Intérieur à l’extérieur… » semblait avoir perdu sa vivacité coutumière. Chapeau l’artiste se disait-il, peut-être ! Car, pour un peu, nous aurions assisté à la naissance d’une nouvelle race de ministre de l’Intérieur. Non point un va-t-en guerre ou un boutefeu, mais quelqu’un qui s’exprime avec finesse, retenue et même humour, quand à la fin, lors du commentaire d’un dessin humoristique, il se permit de conclure par ces mots : « Du temps de N. Sarkozy, il est possible que le ministre de l’intérieur ait su, mais peut-être aurait-il été le seul à savoir ! » signifiant ainsi que la justice eût été, peut-être, empêchée de faire son travail contrairement à ce qui s’est passé sous la présidence de F. Hollande.
Et pourtant, sous ses airs d’adolescent matois, M. Valls est un dur. Il n’a pas hésité, et parfois sans ménagement, à déplacer tous les hauts cadres de la police. Vous me direz que c’est de bonne guerre…Il n’hésite pas à se montrer très ferme dans sa volonté de combattre la délinquance, l’immigration clandestine, notamment celle des Roms. Certains diront qu’il y a là, beaucoup d’esbroufe et de parlote, l’essentiel étant, comme chez N. Sarkozy, de se montrer. Ce n’est donc pas, par hasard, si ce dernier, dans le cadre de sa stratégie d’ouverture, autant dire sa stratégie de prise de guerre, lui proposa en 2007, d’entrer dans son gouvernement. Ce qu’il refusa et bien lui en prit, d’ailleurs, car que sont devenus, aujourd’hui, les Kouchner et consorts ?
De plus, il ne faut pas oublier une chose importante : M. Valls est né, en Espagne, de parents espagnols. Il n’a acquis la nationalité française, qu’à dix-huit ans et s’est fait tout seul, en quelque sorte. Il n’a pas suivi un cursus universitaire prestigieux. C’est avant tout, un militant et un homme de l’ombre, derrière Rocard, puis Jospin et enfin S. Royal avant de se rallier en 2012 à F. Hollande, ce qui lui a permis, enfin, d’accéder à la lumière en espérant bien ne pas s’arrêter en si bon chemin. Ne l’a-t-on pas déjà qualifié de « Vice-Président » dans certains journaux ? Tout ça, pour dire que M. Valls a, peut-être, en son for intérieur et logés dans son inconscient, une soif de revanche et un souci de légitimité bien naturel. D’où son positionnement « à la droite » du P.S. dans une gauche « réaliste » qui, comme il le dit lui-même, ne veut pas « mentir » aux Français.
Ce qui nous permet de revenir à la prestation de M. Valls et à cette fameuse « affaire Cahuzac ».
Je comprends bien, en effet, que l’on ne puisse pas tout dire à la télévision et que toute vérité ne soit pas forcément bonne à dire en tous lieux et en toutes circonstances. Et que donc on puisse pratiquer cette forme douce ou atténuée de mensonge qui s’appelle le mensonge par omission. Il y a donc fort à parier que c’est l’exercice ô combien subtil auquel s’est livré M. Valls dans cette émission. Ce qui exige, tout de même, une grande maîtrise de soi et une grande force de caractère.
A moins que, véritablement, il ne désira pas savoir ce que son inconscient subodorait déjà : la voix figurant sur la fameuse bande enregistrée était bien celle de J. Cahuzac. Ce que, d’aucuns pouvaient reconnaître aisément à condition de seulement prêter l’oreille. Sauf, apparemment, les premiers concernés, ce qui ne lasse pas d’étonner.
Car, de plus, deux indices supplémentaires furent apportés par les chroniqueurs de l’émission, lors du débat : les amitiés plus que trentenaires qu’entretenait M. Valls avec deux personnages majeurs des petits cercles parisiens influents :
S. Fouks, président de Euro-Rscg ex-conseiller en communication de Jospin et de D.S.K (voir à ce sujet, mon article du 14 mars 2011), avec les « bonheurs » que l’on sait ! mais aussi le conseiller de J. Cahuzac et de M. Valls lui-même !
A. Bauer, spécialiste des questions de sécurité et ancien grand maître du Grand Orient de France, obédience maçonnique influente s’il en est, lequel affirmait au journal Le Monde, peu de temps après la révélation de cette affaire : « Mais, bien sûr, J. Cahuzac a ou a eu un compte en Suisse ! » Et, quand on connaît le personnage, et même si l’on n’est pas son ami, on est, au moins, sûr d’une chose, c’est qu’il ne s’avance jamais sans biscuit !
Voilà, donc, ce qui est le plus vraisemblable : tout le monde « savait », mais personne ne voulait vraiment savoir. Car la démission ou la destitution de J. Cahuzac, dès la révélation de l’affaire aurait sonné comme un aveu et une reconnaissance de fait, en pleine discussion budgétaire au Parlement. Ce qui aurait gravement perturbé cette dernière et affaibli, d’autant, le Président. Il valait donc mieux essayer de gagner du temps, laisser faire la justice, allant à son propre rythme plus ou moins lent, quitte à faire le gros dos, en attendant que ça passe….Ce qui permettait aussi de mieux préparer la contre-offensive tout en osant espérer, contre toute évidence, que le pire n’était peut-être pas sûr. Avec l’espoir, peut-être, d’une justice suisse elle-même lente et élusive comme par le passé ?
Mais, c’était oublier trois choses :
L’indépendance et la pugnacité du procureur général du parquet de Paris, F. Moulins, sur lequel ni la Garde des Sceaux, ni le Premier Ministre, ni le Président ne pouvait avoir la moindre prise et dont la mutation éventuelle ne pouvait intervenir « à chaud » en pareille circonstance.
Les progrès enregistrés par la police scientifique et technique en matière de reconnaissance vocale.
La volonté des autorités suisses de contribuer rapidement à la manifestation de la vérité, dans le cadre d’une politique, plus coopérative et accommodante, initiée, notamment, depuis que les américains ont exigé, sous peine de représailles, de connaître les noms de tous leurs ressortissants ayant un compte à l’Etranger.
C’est ainsi que, combinées entre elles, elles ont, assez rapidement permis de tirer les fils de cette histoire, à vrai dire, assez rocambolesque mais néanmoins authentique.
Dont le pouvoir essaye de se tirer, tant bien que vaille, par des demi vérités ou des demi mensonges, en racontant des fables plus ou moins bien enjolivées et en essayant de sauver la face. Mais le mal est fait, et il aura bien du mal à s’en relever. D’autant que le pays va mal et que tous les clignotants sont au rouge. D’autant, aussi, que nous ignorons encore bien des choses, dans cette affaire si symptomatique…
Veritis.