Abdel Cheriguene, 34 ans, habitant des Beaudottes, à Sevran
« Améliorer le quartier, personne n’est contre ! Mais pourquoi quasiment tout détruire ? » Abdel Cheriguene, responsable d’une amicale de locataires aux Beaudottes, est l’un des rares habitants de Sevran à connaître les contours du Grand-Quartier. « Et encore : on n’a pas été invité, on s’est incrusté à leurs réunions », déplore-t-il.
Pour lui, « les habitants, qui sont les premiers concernés, n’ont pas du tout été concertés ». Seuls les conseils citoyens, des instances représentatives issues de la loi sur les nouveaux contrats de ville de 2014, ont été conviés aux rendez-vous de co-construction.
« Aux Beaudottes, le projet prévoit la démolition de 600 logements ! Cela représente les deux tiers de la cité… et personne ne le sait », répète le trentenaire, qui habite lui-même dans une tour qui doit être démolie. « Le plus compliqué, c’est pour les personnes âgées. Je pense à mes parents, locataires dans le quartier depuis les années 1980, qui vont perdre tous leurs repères brutalement. C’est indigne ! » Et de s’interroger : « On va obliger des gens à s’installer ailleurs. Mais qui nous dit que les loyers seront les mêmes, à surface égale ? »
« Ne pas réitérer les erreurs de l’Anru 1 »
Mohammed Maatoug, 33 ans, responsable de l’amicale des locataires de la cité de l’Europe d’Aulnay.
Gardien d’immeuble et responsable d’une amicale de locataires à la cité de l’Europe, Mohammed Maatoug le répète : « C’est une bonne chose que l’Etat mette de l’argent dans les quartiers ! » Mais pas n’importe comment… « Cela se fait en écartant les habitants », regrette-t-il. Exemple concret, aucune des quatre réunions sur le Grand-Quartier auxquelles il a assisté - en mettant le pied dans la porte - n’a évoqué le problème du stationnement ! « Alors qu’il s’agit du souci principal des locataires aujourd’hui, estime-t-il. A 18 heures, c’est impossible de se garer. Qu’en sera-t-il pendant les chantiers ? Et à l’arrivée de la gare ? »
Même regret pour les loyers. « L’Etat s’apprête à injecter des centaines de millions dans les quartiers, mais il semble qu’il n’y ait aucune réflexion pour essayer de baisser le prix des loyers. Pourquoi, par exemple, ne pas profiter de la présence de grosses entreprises sur le secteur pour pratiquer des loyers moins chers ? » Idem sur le développement durable et les économies d’énergie, « sujet absent du dossier ».
Globalement, l’homme regrette que personne ne soit allé « toquer à la porte des habitants de la Rose-des-Vents », quartier HLM frontalier de ce Grand-Quartier, en partie rénové avec l’argent de l’Anru 1, pour « en dresser le bilan ». Et ne pas refaire les mêmes erreurs.
Source article et photo : Thomas Poupeau du journal Le Parisien