Les lunettes de soleil masquent un regard que seule la pochette de son premier album, sur lequel il apparaît le visage divisé en deux, permet de deviner. Goulag les arbore en toutes circonstances, dans ses clips comme dans les allées du centre commercial O’Parinor, où on le retrouve ce jeudi midi. Le signe d’un besoin de se faire remarquer ? À l’écouter, on parierait sur l’inverse.
À 30 ans, Mohamed Amine Djelabi se décrit volontiers comme un membre de « l’ancienne école » d’un rap français en perpétuelle évolution. Sa deuxième mixtape « Perpette ou les îles 2 », suite d’un opus initial paru en 2018, sort ce vendredi. À la mise en scène de ses faits et gestes sur Snapchat ou Instagram, Goulag préfère la discrétion et le travail.
« Les réseaux sociaux, ce n’est pas trop mon truc, lâche-t-il, attablé devant son café. Mes codes ne sont pas ceux de la nouvelle génération. » Son rap « trash » en témoigne. Parrainé par Sefyu, issu tout comme lui de la cité de l’Europe à Aulnay-sous-Bois, le trentenaire natif de Villepinte livre à son public un univers sombre et violent, dans ses paroles comme dans ses clips.
« Le rap, ce n’est pas pour enjailler (divertir) ou pour faire danser les gens, estime-t-il. De nos jours, ça dénonce moins. Il y a moins de messages dans les textes. » Influencé par la drill, un sous-genre du rap né à Chicago (États-Unis) il y a une dizaine d’années et popularisé en Europe par une scène anglaise qui en a revisité les codes, Goulag raconte « ce que je vois, ce que je suis ».
«Ce n’est pas parce qu’on vient du 93 qu’on ne peut pas parler avec des mecs de Paris ou d’ailleurs»
« Je parle de tout et de rien, des bons souvenirs comme des regrets », ajoute l’intéressé, qui reconnaît quelques « bêtises » de jeunesse liées à « l’économie parallèle » (la drogue). « J’ai grandi à Aulnay-sous-Bois, une ville compliquée où plein de faits divers ont eu lieu depuis que je suis là, rappelle-t-il. Les gens, qui rappent sur de la drill, viennent de la rue. C’est ce qui m’a déterminé à continuer dans l’ego-trip sur des prods qui cognent. »
Dans « Perpette ou les îles 2 », le rappeur aulnaysien multiplie les featurings (les collaborations avec un ou plusieurs artistes invités sur un titre) avec ses homologues d’autres villes de France : le Lyonnais Ashe22, le Lillois Osirus Jack, le Parisien Guy2Bezbar ou le Marseillais Solda, l’un des membres de la célèbre « Bande organisée », tube sorti à l’été 2020.
« Ce n’est pas parce qu’on vient du 93 qu’on ne peut pas parler avec des mecs de Paris ou d’ailleurs, plaide Goulag. Petit à petit, il y a une ouverture qui se crée entre les différents artistes. Les bonnes connexions se font spontanément. »