La concession Renault incendiée pendant les émeutes en 2005, avait rouvert quelques mois plus tard, ailleurs sur Aulnay-sous-Bois. Le travail à l'atelier ne manquait pas, mais le déficit de 569 000 EUR depuis quatre ans a poussé le PDG du groupe Nep Car (200 salariés, 6 concessions) à fermer ce garage. Plus de la moitié des salariés aulnaysiens ont été reclassés. Onze sont restés sur le carreau le 21 mai, dont Alain, 54 ans, Michel, 57 ans, David, 33 ans et Jocelyn, 56 ans.
Le contrat de sécurisation professionnelle, signé en juin, leur assure un an de salaire. Mais au-delà, plus aucune certitude. « Ça laisse encore un peu de temps, mais plus ça passe, plus ça va devenir difficile », admet Alain, qui veut rester optimiste. Chez Renault, il touchait 1 500 EUR par mois. Il a rendez-vous le 15 octobre pour passer un concours de mécanicien au ministère de l'Intérieur, après avoir vu une petite annonce. « Je n'ai pas Internet chez moi alors je me débrouille avec les journaux, et je me balade avec mon CV, que je dépose dans les garages, c'est un responsable qui le prend mais jamais le patron. » Ce CV, il l'a concocté avec cette société où Pôle emploi les a dirigés, lui et les autres de chez Renault. « On y fait notre CV, des lettres de motivation, on y va tous les quinze jours, et quand la conseillère est malade, comme cette semaine, on doit attendre, car elle n'est pas remplacée. On est livré à nous-mêmes. »
Michel, lui, ne s'attendait pas à mettre autant de temps à retrouver un emploi. A deux ans de la retraite, il veut se reconvertir en magasinier. « J'ai eu des offres d'emploi, mais à Rungis (Val-de-Marne) ou à Melun (Seine-et-Marne), c'est trop loin pour moi maintenant, j'ai passé l'âge et pour le salaire qu'on va m'offrir, je ne vais pas m'y retrouver, explique cet habitant du Blanc-Mesnil. Je veux travailler mais pas à plus 30-45 minutes de chez moi. » Il admet avoir des « coups de cafards ». Pour lui, le moral va « moyennement ». « On se voit entre nous, on se fait un repas », raconte-t-il. Le contrecoup, il l'a senti très vite. « Les premiers jours, j'étais content d'être chez moi mais maintenant, c'est long. Et notre employeur nous a lâchés comme trois fois rien, sans aide, comme s'il n'en avait rien à foutre de nous, après 38 ans de boîte... Heureusement que ma femme travaille ! Vu l'âge qu'on a on s'inquiète un peu », ajoute-t-il, en pensant que David, plus jeune aura moins de mal.
Le benjamin de 33 ans est parti tenter sa chance dans le sud ouest, avec femme et enfants, « à la recherche d'un nouvel eldorado ! » sourit David, optimiste. Lui n'a pas signé le contrat de sécurisation professionnelle, proposé par Pôle emploi, qui le liait à son ancien secteur d'habitation, Mitry-Mory.
« Sans réseau, sans piston, c'est difficile », constate Jocelyn, 56 ans, qui distribue lui aussi des CV dans le moindre garage autour de Sevran. « J'ai même vu que mon garage recherchait un mécano dans un Renault Minute j'ai laissé un CV », dit-il. Il a passé ses vacances à prospecter et guette d'hypothétiques réponses -- il n'en a eu qu'une, un refus -- conscient que son expérience d'électricien automobile n'est pas la compétence la plus recherchée. « Je fais aller », explique ce père de famille qui touchait 1 300 EUR par mois, et s'accroche à l'espoir de signer un CDI. Il se laisse encore un peu de temps avant de pousser la porte des agences d'intérim.
Source : Le Parisien