Publié le 29 Juin 2014
Après un audit interne, le département a découvert une importante fraude qui durait depuis dix ans. Deux plaintes ont été déposées et quatre agents suspendus.
Près de 2,5 M€ abusivement versés depuis 2002 en Seine-Saint-Denis au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ou de la prestation compensatoire du handicap (PCH)... La facture est douloureuse pour le conseil général qui a fait cette amère découverte au détour d'un audit on ne peut plus classique.
Depuis 2010, le conseil général de Seine-Saint-Denis s'est doté de son propre service d'audit, en interne. Dix agents, rattachés à la direction générale, passent ainsi au crible tous les services du département. En novembre 2013, c'était au tour de la direction de l'allocation aux personnes âgées et aux personnes handicapées. La comparaison de fichiers a mis en lumière des discordances entre le nombre de dossiers instruits par la commission départementale, qui décide d'ouvrir des droits, et les ordres de paiement. Ainsi, des allocations auraient été versées sans que la commission ait eu à se prononcer. Après l'audit, c'est une enquête administrative qui a été menée depuis mars 2014 pour y voir clair et lever le doute sur d'éventuelles malversations internes.
« Les versements ont été suspendus, le temps que les allocataires fournissent des précisions », précise-t-on au conseil général. A moins d'un piratage de l'extérieur, les ordres de paiement avaient été validés par des agents du département. Trente-deux dossiers d'APA frauduleux ont été identifiés, portant sur 350 000 € indûment versés entre 2002 et 2014. La fraude à la prestation compensatoire du handicap est estimée à 2,1 M€, entre 2006 et 2014. Les bénéficiaires vivraient dans plusieurs villes de Seine-Saint-Denis. Ils recevaient sur leurs comptes des allocations qu'ils n'auraient pas dû percevoir comme ce jeune de 28 ans qui aurait touché l'APA.
Une plainte a été déposée le 18 avril au commissariat de Bobigny pour fraude aux prestations publiques, puis une autre, le 15 mai, auprès du procureur de la République, pour dénoncer la probable implication d'agents. Dès le lendemain, des sanctions administratives sont tombées : quatre employés du conseil général, hommes et femmes, sont à ce jour suspendus, à titre conservatoire. Ils risquent la révocation, et plus au niveau pénal, s'ils sont reconnus coupables de fraude. Ils auraient pu agir pour eux et pour le compte de tiers.
Comparées au volume total d'allocataires en Seine-Saint-Denis et au montant versé sur la même période par le département, ces sommes restent minimes puisqu'elles représentent 0,33 % des allocations (726 M€) versées à 81 000 bénéficiaires. « Mais ce qui est totalement insupportable, c'est que ce système, que l'on a découvert, remet en cause les valeurs de solidarité, d'honnêteté et de dévouement », déplore Stéphane Troussel, le président(PS) du conseil général. A la police judiciaire de poursuivre l'enquête.
Source : Le Parisien