« Vous payez la cantine plus cher, cette année ? » La question arrache un rire grinçant à ce groupe de mamans, devant l’école Louis-Aragon, à Aulnay. La révision des tarifs de restauration scolaire, votée lors du conseil municipal de juin, fait grincer des dents dans cette commune où plus de 6 500 enfants déjeunent à l’école.
Le tarif, appliqué en fonction des revenus des familles, était autrefois compris entre 0,71 € et 5,62 €. Il oscille désormais entre 1,25 € et 5,80 €. Le calcul prend désormais aussi en compte les « ressources », ce qui inclut les versements de la Caisse d’allocations familiales.
La mesure frappe au porte-monnaie bon nombre de parents, surtout dans les couches modestes. Dans le quartier populaire du Gros-Saule, une mère de famille lève les yeux au ciel. « Je payais 10 € par enfant et par mois, l’an dernier, explique-t-elle. Cette année, le tarif a triplé ! » Or, quatre de ses enfants fréquentent la cantine, deux en élémentaire et deux en maternelle. Maman d’un nourrisson, elle n’imagine pas les faire manger à la maison : « Avec un bébé, j’ai déjà peu de temps. Si je fais un aller-retour supplémentaire entre l’école et la maison, ça devient vraiment compliqué… » Julienne et Assia, deux autres mères d’élèves, se lamentent aussi : « On gratte le fond de nos poches, encore et encore… »
Dans l’entourage de Bruno Beschizza, le maire LR, on assume cette hausse des prix, censée épargner les classes moyennes et les familles monoparentales : « Auparavant, le système était tellement attractif qu’aucours de l’année scolaire 2014, on est passé de 50 % d’enfants inscrits à la cantine à 75 % ! » Et on souligne que le prix maximal d’un repas reste nettement inférieur à son « coût réel », estimé à 11,60 € (incluant aussi bien l’achat des denrées, la masse salariale, l’acheminement des repas…).
« Pour les situations d’extrême précarité, il est possible d’avoir une aide exceptionnelle du Centre communal d’action sociale », ajoute la mairie. « C’est vrai que les tarifs d’Aulnay restent moins chers qu’ailleurs. Mais le mode d’inscription a aussi changé. Personnellement je ne paie pas plus cher par repas, mais on me facture quatre déjeuners, même si ma fille ne va à la cantine que deux fois dans la semaine », souligne Christelle Dauvin, représentante FCPE à l’école du Bourg 1.
Dans les rangs de l’opposition, on s’insurge : le parti communiste affirme dans un tract que la cantine est « devenue financièrement inabordable pour beaucoup de parents d’élèves ». Pour l’heure, les demi-pensionnaires à Aulnay sont aussi nombreux que l’an dernier. La municipalité, qui voulait inscrire en priorité les écoliers dont les deux parents travaillent, n’a finalement refusé personne.
La sélection sera-t-elle financière ? Certains hésitent, comme cette maman : « Je vais essayer de ne pas inscrire mes enfants. Pourtant, je cherche du travail, j’ai besoin de temps pour aller aux rendez-vous. Mais je n’ai pas les moyens de payer autant. J’essaierai de m’arranger avec des copines, des voisins… »
Source : Le Parisien