Les habitants de notre commune se rappellent grâce à sa façade, que le Prado, actuellement Le New Resto, au 24 rue Jules Princet était un cinéma, haut lieu du septième art à Aulnay-sous-Bois. Il reste dans les souvenirs des anciens les sorties du samedi soir et celles du dimanche après-midi en famille. A pied, en vélo, le cinéma était la distraction de fin de semaine.
Au début du XXème siècle, au temps du cinéma muet, Aulnay disposait de plusieurs établissements dans lesquels étaient projetés des films de cet art naissant. Le premier établissement spécialement construit pour le septième art et accessoirement pour le théâtre fut Le Prado en 1913.
Il disposait de 700 places. L’ancienne entrée franchie, on pénétrait dans le hall qui donnait accès au balcon par un escalier et, par deux portes latérales, à la salle. Cette dernière, très dépouillée, était plutôt du style hangar avec ses formes métalliques apparentes.
La façade prit l’aspect de celle toujours visible actuellement, les charpentes métalliques disparurent sous un habillage de staff et de contreplaqué. De part et d’autre de la scène, des personnages de la Commedia dell’arte étaient représentés, avec en bonne place, Arlequin et Colombine. Dans la fosse, à l’avant de la scène, se trouvaient les musiciens. Ils accompagnaient par des airs appropriés la projection des films muets. Le Prado s’enorgueillissait dans ses prospectus de disposer d’un « orchestre symphonique sous la direction de Monsieur Lambert ».
Après le premier conflit mondial, le Prado eut ses heures de gloire avec des films qui marquèrent leur époque comme : le défilé de la victoire sur les Champs-Elysées le 14 juillet 1919, la projection du premier parlant de Maurice Chevalier en septembre 1930 et bien d’autres par la suite.
La concurrence était vive entre les trois grands cinémas (Prado, Capitole, Palace). En plus de la publicité dans la presse, chacun disposait d’une camionnette sur laquelle étaient collées des affiches. Ces véhicules circulaient dans Aulnay, des haut-parleurs diffusaient de la musique et donnaient des informations sur les programmes de la semaine.
Dans « Souvenirs d’un montreur d’ombres », le projectionniste Robert Froment parlait ainsi du Prado : « Pendant la guerre, c’était fou, des marées humaines. De ma fenêtre de cabine, quand je voyais la queue en bas, ça faisait une masse qui se déplaçait à droite, à gauche. Incroyable ! La fille du puisatier, on a fait un massacre avec des films comme ça, avec tous les films de Pagnol d’ailleurs.
Dans les années 50, il y avait du monde. Ça a commencé à tomber… Les patrons du Prado furent Messieurs Verneuil, Reres, Verreca.
Quand vous voyez un film en 70 mm, avec le son stéréophonique… J’ai eu des clients, quand ils sont venus voir Le jour le plus long, c’était une copie en noir et blanc cinémascope, eh bien, les types levaient la tête comme si les bombardiers étaient au-dessus dans les plafonds.
En 70, on travaillait encore bien. Puis Monsieur Puren a repris en 74. Il y a eu une chute continue »
Peu avant la fermeture du « dernier » cinéma d’Aulnay en 1985, l’association « Les amis du Ciné-sous-Bois » disait « La municipalité devrait, en principe, racheter le Prado. Nous espérons que la vocation cinématographique sera maintenue. Notre association ne peut en effet imaginer une fermeture définitive qui porterait un grave préjudice au développement culturel de la commune ».
La salle restée vide fut occupée par les Restos du Cœur, puis par un dépôt vente de meubles. En 1992, le bail fut repris par un restaurateur. Ce dernier fit refaire la salle pour l’adapter à sa nouvelle fonction. Il eut le bon goût de garder la façade, ne dépaysant pas trop les Aulnaysiens qui ayant connu le cinéma, s’y rendaient pour se restaurer.
Source information : C.A.H.R.A. Cercle Archéologique et Historique de la Région d'Aulnay, avec tous nos remerciements.
Source photos 1 et 2 : Archives départementales de la Seine-Saint-Denis / Source photo 3 : Google Maps