Fatigué des dégradations, des départs d'incendie, du trafic, un groupe de copropriétaires d'Aulnay a décidé de s'organiser. Travaux, occupation des halls : les Mimosas se rebiffent.
C’est un petit garçon de 5 ans qui n’ose plus entrer dans la salle de bains. « C’est là que se trouve la bouche d’aération, par où la fumée est entrée le soir de l’incendie, raconte sa maman. Il a vu son papa paniqué, essayer de colmater l’ouverture. Depuis, je l’emmène voir un psychologue. » L’anecdote résume le mal-être des habitants du 11, allée des Mimosas à Aulnay. Dans cette tour de 90 logements, au sein d’une copropriété privée vieillissante du quartier de Mitry-Ambourget à Aulnay, les habitants vivent au rythme des débuts d’incendie (six en un an), des dégradations incessantes, de l’irruption de squatteurs dans le hall… Et se sentent abandonnés en dépit d’un plan de sauvegarde financé à 75% par des fonds publics. « Ça fait cinq ans que ça se dégrade, j’en avais ras le bol », confie cette mère de cinq enfants, désormais indifférente à la jolie vue arborée qu’elle peut contempler de son balcon. Avec quelques voisines, elle a décidé de réagir, en regagnant pied à pied ce qu'elles ont appelé leur «espace vital».
Le déclic a eu lieu après un incendie dans le hall, un peu plus important que les autres, le 28 décembre. « On est allées taper aux portes, réclamer 10 € par famille, pour acheter de la peinture et remettre le hall en état. » Tout le monde ou presque a alors mis la main à la poche. Courant janvier, une dizaine de personnes investissait le hall, lessivait les murs, et les repeignait. L’initiative n’a pas mis fin aux départs de feu (le dernier, fin mars, a privé l’immeuble d’Internet pendant une semaine), les vitres du hall ont depuis été brisées, mais les habitants se sont enhardis, en créant l’association Solremi (Solidarité et résistance Mimosas). Pour mettre fin à l’occupation du hall, directement liée selon certains au trafic de drogue dans le quartier, ils ont occupé le terrain : « On était quatre, on s’est installés dans l’entrée, et les squatteurs n’ont pas pu s’installer. D’autres voisins, intrigués d’entendre des voix, sont sortis de chez eux, on a fini à une dizaine. On est revenus tous les soirs pendant une semaine. Depuis, c'est plus tranquille, mais on sait que ça peut revenir. »
L'idée fait des petits
Dans la copropriété de 890 logements, sous administration judiciaire depuis 2003, l’idée fait boule de neige. Dans la tour voisine du 12, rue des Aulnes, confrontée elle aussi au trafic, une association s’est créée sur le même modèle : « On va se battre, personne ne défend notre cause », assure une dame qui, comme les autres, tient à son anonymat par crainte des représailles. Unemanifestation pourrait avoir lieu le 14 avril. Elle aura le soutien de Raoul Mercier, conseiller municipal (PS) délégué aux copropriétés, qui avait reçu les habitants en début d’année : « Il est difficile pour les pouvoirs publics d’intervenir dans une copropriété privée. Je leur avais conseillé de se prendre en main. » L’administrateur judiciaire, Philippe Blériot, indique de son côté avoir alerté les pouvoirs publics sur les problèmes de sécurité à plusieurs reprises. En juin, la réhabilitation de la copropriété va débuter, sous la surveillance permanente d’équipes de maîtres-chiens censées éviter les vols de matériel et les agressions.
Source information et photo : Gwenael Bourdon, Le Parisien du jeudi 5 avril 2012