Pas un jour sans agression dans le RER B
Publié le 17 Décembre 2010
Pas un jour sans agression dans le RER B...
Alors que la presse a largement couvert l'inauguration en grande pompe d'une nouvelle rame du RER B relookée façon glamour, un événement presque relayé comme si une interconnexion venait d'être établie avec la lune, le Parisien du 27 novembre dernier titrait, quant à lui, pas un jour sans agression dans le RER B. Une accroche assez racoleuse lorsque l'on songe que dans l'article il est admis qu'aucune statistique officielle n'est disponible sur le sujet ! Mais peu importe puisque l'épouvantail de la sécurité fait toujours recette.
La sécurité. Attention terrain miné. Si chacun s'accorde à reconnaitre que la sécurité devrait être un droit garanti pour chaque citoyen, la manière pour obtenir un tel résultat parait des plus incertaines. Je schématise, mais grosso modo si vous en faîtes trop avec une présence renforcée des forces de l'ordre et des caméras à tous les coins de rue le spectre de l'Etat policier façon 1984 apparait subitement empiétant sur les libertés individuelles, alors que si vous n'en faîtes pas assez on vous taxe de laxisme. Ainsi difficile de trouver l'équilibre et le savant dosage qui tend vers l'efficacité sans oppresser....
Mais revenons au RER B ? Cette ligne est-elle à ce point dangereuse pour les voyageurs comme semble l'indiquer le journal francilien ? Personnellement, j'ai fréquenté quotidiennement cette ligne du 15 juillet 1996 au 31 décembre 2003, essentiellement sur le tronçon nord (De Denfert-Rochereau au Parc des Expositions) , pour me rendre au travail. A toutes les heures. Parfois très tôt le matin ou fort tard le soir. J'ai sans doute comme beaucoup d'entre vous connu toutes les situations possibles : l'arrêt sans raison, le signal d'alarme, l'accident de personne, l'interconnexion suspendue et la gare de surface (voies 32, 33 de mémoire), les grèves, la peur de l'attentat et autres joies du retard et de l'inconfort qui rend chaque trajet presque unique dans sa diversité et ses surprises...
Toutefois, en matière d'insécurité, pendant ces presque 7 ans et demi je n'ai été confronté directement qu'en trois occasions à des situations que je qualifierais sobrement d'un peu chaude. La première fois, en période de grève dure, dans un wagon bondé, une altercation entre personnes excédées d'être entassées comme du bétail a failli tourner au vinaigre. Quelques autochtones avaient envie de passer leurs nerfs sur des touristes coupables d'avoir trop de bagages et qui à mon avis ont depuis gardé une image écornée de la France. Heureusement avec un peu de pédagogie et l'appel au calme de quelques voyageurs nous avons évité le pire.
La seconde fois c'était un vol de bagage justement, en direct. Une touriste sans doute toute à sa joie de visiter enfin Paris n'a pas prêté attention au petit scénario semble-t-il bien huilé et répété en gare de Villepinte. Quelqu'un monte, se colle debout au siège en strapontin, jette un œil, repère sa victime et part avec un de ses bagages au moment où la sonnette d'alarme annonçant le départ s'amorce. Une autre personne se met devant les portes pour couvrir la fuite. La malheureuse n'a eu le temps de prononcer qu'un inutile "fuck" qui résume assez bien son impuissance du moment.
La dernière fois fut assez particulière et je m'en souviens presque comme si c'était hier. Il n'était pas vraiment tard mais la nuit était déjà tombée. Notre wagon était relativement bien rempli mais tout le monde était assis soit en train de lire, écouter de la musique ou perdu dans ses pensées. Lorsqu'à la gare de Villepinte, encore, un groupe d'une bonne dizaine d'individus passablement excités s'est étalé dans le couloir sur toute la longueur de la rame. Etrangement une tension indicible mais pourtant presque palpable s'est tout de suite installée dans le train. Comme si quelque chose de désagréable pouvait se passer. Je peux sans mentir écrire qu'une peur mystérieuse a dû au moins traverser chacun d'entre nous jusqu'à leur descente en gare de Sevran-Beaudottes. Ce trajet entre simplement deux stations est apparu comme l'un des plus longs de ma vie. S'agissait-il d'un sentiment de crainte irrationnel ? Une forme diffuse d'insécurité ressentie sans raison ? Puisque et ce n'est pas le moindre des paradoxes, rien n'est arrivé...
Voilà. C'était ma petite façon à moi de réagir par rapport à l'article alarmiste du Parisien que je relaie ci-dessous. Le climat s'est-il véritablement durci depuis 2004 ? Je n'en sais rien... A vous de faire partager votre expérience sur cette question si vous en avez envie...
Stéphane Fleury
Source : Carole Sterle Le Parisien du 27 novembre 2010.