Le Billet de Veritis : Rives et dérives des Collectivités territoriales ?
Publié le 24 Mars 2011
L’examen d’un tableau des effectifs ou d’un budget détaillé d’une collectivité territoriale est toujours une source de perplexités ou d’étonnements.
Il faut, bien souvent, lire entre les lignes ou chercher dans le détail parce que rien n’est fait pour mettre en évidence un certain nombres de choses qui, parfois, peuvent paraître troublantes ou surprenantes.
S’agissant des tableaux des effectifs.
Au delà des définitions officielles, la nature exacte du travail réalisé par des chargés de mission ou autres collaborateurs de cabinet ou autres attachés à la Direction Générale, n’apparaît pas toujours clairement. S’agit-il en réalité de postes strictement administratifs ou de postes plus ou moins liés à la vie d’un parti politique ou d’un mélange des deux ?
Que penser également des postes résultant non pas d’un concours territorial, mais de statuts contractuels le plus souvent à durée déterminée ? Comment sont assurés ces recrutements ? Comment une telle précarité n’implique-t-elle pas une certaine docilité, pour le cas où celle-ci n’aurait pas été préalablement vérifiée avant l’embauche ? Comment être sûrs de la qualification, de l’expérience et de la réalité du travail de tel ou tel collaborateur lorsqu’il se trouve, par ailleurs, avoir des responsabilités dans un parti politique ?
Comment être sûr que les proches de tel ou tel élu ne sont pas privilégiés en matière de recrutements ? Comment être sûr que tel ou tel poste n’est pas proposé en raison de services rendus ? Ou bien n’est pas un poste, plus ou moins, de complaisance ?
S’agissant des rémunérations, indemnités ou avantages annexes.
Que penser également de ceux qui occupent un poste « administratif » dans une commune ou un département et un mandat d’élu politique par ailleurs, cumulant ainsi rémunérations et indemnités qui additionnées correspondent à la rémunération d’un cadre supérieur ?
Comment sont traitées les indemnités annexes ou autres dans une communauté de communes ou d’agglomération, une intercommunalité, un syndicat mixte, un organisme public, une société d’économie mixte, etc ? Que représentent les différents frais de missions ou de représentations ? (frais de déplacements, voyages pris en charge, réceptions, mise à disposition de véhicules ou de chauffeurs …) ? Quels peuvent être les avantages en matière de logements de fonction ou autres ?
S’agissant des associations.
Les associations sont un vecteur évident de la vitalité culturelle, sportive ou sociétale d’une collectivité territoriale. Il ne s’agit donc pas ici de s’élever contre cet état de fait mais bien au contraire de s’en réjouir.
Cela étant, ce type de structure peut ouvrir la voie à de circuits financiers plus ou moins orthodoxes. Lesquels, semble-t-il, avaient cours, lorsqu’il n’existait pas de financement officiel des partis politiques, mais qui, apparemment, n’auraient peut-être pas totalement disparu depuis ( ?)
Il est d’ailleurs piquant d’entendre, au cours d’un colloque ou d’un séminaire, consacré à un département de notre République, une organisation politique de gauche (A) décrire par le menu les pratiques d’une autre organisation politique de gauche (B) ! Quand, ce n’est pas l’inverse !
On comprend alors que certains auteurs n’hésitent pas à parler de « fromages » de la République !
Les problèmes que tout cela pose sont nombreux.
Que dire ainsi lorsqu’on apprend que tel permanent d’une association est aussi ou surtout un militant actif d’un parti politique ? Que penser d’une large subvention votée à une association organisant telle ou telle manifestation sportive ou culturelle ? Qui s’accompagne éventuellement de l’embauche de permanents ou le financement de tel ou tel encart publicitaire ou encore l’utilisation d’une structure associée et « amie » ?
Que penser, à contrario, lorsque, en cas de changement de majorité, on fait comprendre à un responsable d’une association d’intérêt général que la poursuite du versement d’une subvention est directement liée à une « neutralité » politique, en dehors de la vie de l’association, laquelle n’a pas lieu d’être s’agissant du droit élémentaire d’un citoyen ?
S’agissant de la professionnalisation de la politique.
Le problème qui est ici posé est celui de l’égalité non plus formelle mais « réelle » des citoyens afin de leur garantir des moyens et des chances identiques quant à l’accès à des fonctions électives.
Il n’est pas bon, en effet que certains types de professions ou certaines « filières » fournissent le plus clair des responsables d’un exécutif territorial. Au nom de la nécessaire diversité des expériences et des points de vue. Au non d’une saine représentativité de la société civile dans toutes ses composantes.
Par ailleurs, il est bien évident que les compétences managériales nécessaires à l’administration d’une commune ou d’un territoire impliquent des connaissances techniques étendues qui ne dérivent pas forcément d’un seul parcours politique ou professionnel.
Qu’en même temps le confinement à un seul type d’expérience et de parcours politique, syndical ou professionnel ne prépare pas forcément de la meilleure des manières à l’appréhension d’une société complexe et non réductible à des schémas binaires.
Qu’enfin, la création d’une « caste » politico administrative peut entrainer, si l’on n’y prend garde, une coupure dommageable entre les simples citoyens pris dans leur diversité et leurs représentants.
Que dés lors, parler seulement de démocratie représentative, s’agissant, notamment, d’élections dans lesquelles le taux d’abstention est élevé, peut s’avérer insuffisant pour assurer une bonne administration de la Cité.
Que peut-on retenir de tout cela ?
Il est possible de mettre en évidence sept points majeurs :
1. Les partis politiques concourent à la vie de la Cité. Mais ils n’en ont pas le monopole.
2. L’expression du suffrage universel doit pouvoir s’exercer librement et en toute sérénité, sans pression d’aucune sorte.
3. Le mandat reçu par les élus n’est qu’un mandat délégué par les citoyens.
4. Les élus doivent dans leur diversité représenter l’ensemble des électeurs.
5. Les finances publiques doivent être gérées en toute transparence.
6. Les ressources financières gérées par les élus doivent être exclusivement mises au service de l’intérêt général et non d’un intérêt partisan.
7. Les frais de fonctionnement et les dépenses d’investissement des collectivités territoriales doivent obéir à des règles de bonne et saine gestion.
Il ne s’agit là que d’évidences. Encore faut-il ne pas les oublier en route !
Ostensiblement ou mezza voce …