L'embarrassante minute de silence dans les écoles d'Aulnay-sous-Bois après la tuerie de Toulouse
Publié le 21 Mars 2012
Si nul ne songerait à nier l'horreur du drame intervenu ces dernières heures dans un établissement scolaire de Toulouse et la nécessaire solidarité nationale à manifester en cette occasion, il n'en reste pas moins que la minute de silence respectée hier dans les écoles d'Aulnay-sous-Bois demeure à bien des égards quelque peu embarrassante. En effet, quel intérêt y'a-t-il par exemple à la faire observer à des enfants âgées de 4 à 7 ans en leur expliquant que trois de leurs semblables ont été froidement abattus ? Quel est exactement l'effet escompté ? Suggérer que l'école est un lieu potentiellement mortel pour tous ? Qu'au moindre bruit généré par un scooter il faut prendre ses jambes à son cou pour tenter d'esquiver la grande faucheuse ?
La question n'est pas tant d'occulter ou non aux enfants en bas-âges la vérité dans ce qu'elle a de plus cruel mais de savoir s'ils sont réellement en position d'appréhender les événements dans toutes leurs dimensions pour les assimiler et les comprendre. Dans le cas présent, il y a de fortes probabilités qu'une bonne majorité d'entre eux soient très peu au fait des équilibres géopolitiques instables de certaines régions du monde et de leurs conséquences potentiellement dangereuses sur le territoire national. Ces enjeux échappent d'ailleurs aussi sans aucun doute à des adultes pourtant majeurs et vaccinés. Alors, susciter ainsi, sans le moindre recul, l'angoisse et la peur des plus petits d'entre nous peut paraitre maladroit pour ne pas écrire inapproprié, quelle que soit la légitimité de l'hommage à rendre aux victimes.
Enfin, la méthode employée est également contestable. En effet, placer les parents devant le fait accompli et dans l'obligation de fournir des explications le soir même à la maison pour apaiser les inquiétudes générées à cette occasion est plutôt injustifiable. Tout le monde n'y est pas préparé ou ne dispose pas d'un psychologue à domicile. Dans le cas présent, la moindre des précautions élémentaires des plus hautes sphères de l'Etat n'aurait-elle pas été de faire preuve d'un minimum de pédagogie pour suggérer qu'enseignants et parents d'élèves évaluent sur un pied d'égalité l'opportunité d'évoquer ou non en classe une telle tragédie plutôt que de céder à l'urgence émotionnelle immédiate ?
Les enfants à cet âge sont en construction et n'ont pas à être conditionnés en fonction de l'actualité aussi lourde et préoccupante soit-elle. Pas plus que le libre arbitre des parents ne saurait être confisqué pour raison d'Etat...