Deux morts dans la Punto qui fuyait la police à Aulnay-sous-Bois : les témoins racontent
Publié le 3 Juin 2014
La voiture s’est retournée boulevard Michel-Ange, tuant ses deux passagers. Selon les premiers constats, il n’y a pas de trace de choc avec un autre véhicule.
Au sol, des traces de pneu et des bris de verre, un arbre écorché et, sur le côté, une barrière qui a volé, laissent deviner la violence de l'accident qui a coûté la vie à deux automobilistes, dans la nuit de dimanche à lundi, à Aulnay-sous-Bois. Une enquête devra déterminer les circonstances précises de ce drame. Pour les autorités, qui disposent des premiers éléments de l'enquête, la voiture, une Fiat Punto, voulait échapper à la police. La police n'était pas loin mais, de source officielle, elle n'a pas assisté à l'accident. En « l'absence de traces de choc » sur la voiture accidentée, le parquet de Bobigny n'a pas saisi l'inspection générale de la police nationale, mais la sûreté territoriale.
Les premiers éléments d'enquête sont ceux qu'ont fournis les fonctionnaires et les enregistrements des ondes de la police. La Fiat aurait été repérée vers 0 h 40 à la Rose-des-Vents, la cité des 3 000, après avoir franchi un feu rouge, avec à son bord « deux hommes capuche sur la tête ». L'équipage de la brigade anti-criminalité aurait alors sorti gyrophare et sirène pour convaincre la voiture de s'arrêter. « Les policiers ont perdu de vue la voiture, ils n'ont pas assisté à l'accident », assure le chef d'état-major de la police en Seine-Saint-Denis.
Selon une autre source policière, tout cela se serait produit en quelques minutes. Le choc, bruyant « comme de la ferraille », raconte une retraitée, a mis en émoi le quartier pavillonnaire qui borde la rue Michel-Ange et les cités alentour. Dès hier matin, le maire UMP Bruno Beschizza mobilisait les médiateurs de la ville pour sillonner le secteur. « Nous étions dans la cuisine et nous avons entendu ce bruit, quand nous avons regardé à la fenêtre, nous avons vu les gyrophares de la police », assurent deux jeunes riveraines, pour qui les policiers n'étaient donc pas loin. Elles sont sorties et ont croisé les secours, le Samu, ont entendu un policier parler au passager, « il lui disait :ne dors pas, je suis avec toi, accroche-toi. Ses jambes étaient à l'extérieur, les pompiers ensuite ont eu du mal à le sortir, ils apportaient des bouteilles d'oxygène. » Les pompiers ont eu recours à un camion de désincarcération et deux ambulances de réanimation. Le premier blessé est décédé à 1 h 30, le deuxième un peu avant 3 heures. Seul le passager, Karim, a été identifié, pas le conducteur. La voiture avait été déclarée volée samedi à Vaujours. Elle contenait un sac avec deux passeports américains.
Hier, vers 20 heures, un petit rassemblement s'est formé sur les lieux de la tragédie, à l'appel du collectif Urgence notre police assassine, qui met en doute la version policière des événements. « Nous soutiendrons la famille jusqu'au bout », a affirmé Amal Bentousni, fondatrice du collectif et soeur d'Amine Bentounsi, tué à Noisy-le-Sec par un policier en 2012. « Si des gens ont vu quelque chose au moment de l'accident ou juste avant, il faut qu'ils contactent l'avocat ou le juge qui sera désigné. » Driss pourrait être de ceux-là. Il explique qu'il effectuait une livraison dimanche soir quand il a vu la Fiat. « La Punto était rue Edgar-Degas, le véhicule de police était derrière. Il a donné un coup de gyrophare, a fait un appel de phares. Au lieu de s'arrêter, la voiture est partie à toute vitesse. Elle a grillé un feu, puis elle a tourné. La police l'a peut-être perdue de vue quelques secondes. J'ai repris ma voiture, j'ai suivi. Je suis arrivé juste après l'accident. La Punto était retournée, klaxon bloqué. Un policier tenait le pied d'un des blessés, l'autre téléphonait pour appeler les secours. La voiture de police n'était pas tamponnée [NDLR : ne portait pas de trace de choc] ». Le jeune homme n'excluait pas, « s'il le faut », de fournir son témoignage à la justice.
Source : Le Parisien