Des mamans bloquent toujours le collège Victor Hugo d’Aulnay-sous-Bois
Publié le 12 Décembre 2014
Physique-chimie, musique, maths... Sur des tables disposées dans le hall d'entrée, quelques collégiens viennent puiser des feuilles d'exercices et d'activités, avant de rentrer chez eux. Depuis le début du blocus, au collège Victor-Hugo d'Aulnay, les profs veillent à donner du grain à moudre aux élèves. .. en attendant la reprise. « Et ils sont nombreux à faire leurs devoirs et à les rapporter ! », assure une maman.
Cela fait deux semaines que les parents, avec le soutien des enseignants, empêchent la tenue des cours (tout comme dans deux autres collèges de la ville, Christine-de-Pisan et Gérard-Philipe). L'établissement n'a pourtant pas été gommé du nouveau réseau d'éducation prioritaire (REP). Mais cela ne suffit pas. Parents et profs veulent obtenir le classement en REP + et davantage de moyens, pour cet établissement installé au coeur de la cité de la Rose-des-Vents (dite des 3 000). « Le collège Debussy, à deux pâtés de maison, y a droit. Pourquoi pas nous ? C'est la même population, le même nombre de boursiers... », fulmine Houria. Cette maman a elle-même été élève dans le collège. « On n'avait pas droit à toutes ces aides, à l'attention des professeurs. J'ai vu les choses évoluer. On ne veut pas perdre ces moyens », glisse-t-elle.
Tous les matins depuis quinze jours, Houria confie donc ses petites jumelles de 13 mois à l'un de ses grands enfants, pour accourir au collège. Le « bureau des parents », une petite pièce à l'entrée du bâtiment, est devenu le quartier général. On y aperçoit un thermos de café, un pot de confiture traînant sur une table. C'est ici que se rassemble la petite armée des mères de famille, plus disponibles que les hommes. Hier matin, elles étaient une quinzaine. « Mais on réunit l'ensemble des parents tous les deux jours, et on les fait voter pour ou contre la poursuite du blocus ! », précise Nassera. Mercredi soir, ils étaient 90 à se prononcer pour.
Pour occuper le collège, les mamans ont dû s'organiser : « A 8 h 15, on rassemble tous les enfants qui vont à l'école primaire, et c'est l'une d'entre nous qui les accompagne tous. » Pendant ce temps, les autres prennent possession des lieux.
Hier matin, elles ont reçu la visite de quelques parents du collège Christine-de-Pisan, également mobilisés. « On ne fait plus les courses, on n'est plus à la maison », soupire Katja, mère d'une fillette en classe de 5e, qui doit concilier ses horaires d'employée de ménage et sa participation au blocus. « C'est important d'avoir des moyens dans notre collège. Par exemple, il faut financer l'aide aux devoirs. Beaucoup de parents sont non-francophones, ils ne peuvent pas aider leurs enfants », explique-t-elle. Karima approuve : « Ça me fait mal au coeur que les profs absents ne soient pas remplacés. Moi je n'ai pas pu faire des études, je veux que mes enfants aient leurs chances. Ce qui se passe aujourd'hui est une injustice. »
Nassera, la voix éraillée par la colère, parle de sa fille : « Elle est en 3e, et elle est en décrochage scolaire. Je ne devrais pas faire le blocus, parce qu'il faut qu'elle aille en cours, qu'elle ait son brevet. J'ai presque l'impression de la sacrifier, pour que mes fils en 4e et en 5e aient une scolarité normale. Mais on ira jusqu'au bout ! » Demain, parents et enseignants ont prévu de défiler à nouveau dans les rues d'Aulnay.
Source article et photo : Le Parisien / Vidéo : Aulnaylibre !