Aulnay-sous-Bois : un jeune homme jugé pour avoir tué son ancienne amante de 53 ans de 33 coups de couteau
Publié le 9 Septembre 2014
« J'ÉTAIS PAS MOI-MÊME. C'était irréaliste. J'ai du mal à accepter la possibilité de tout ça. » Debout dans le box des accusés, le jeune homme, qui souffre d'une pelade -- une maladie qui lui a fait perdre tous ses cheveux et ses poils -- semble lutter avec lui-même. Comme s'il lui était impossible de se souvenir. Dans la soirée du 19 au 20 avril 2012, à Aulnay-sous-Bois, Mehdi Yahiaoui, alors âgé de 27 ans, a tué de plus de trente coups de couteau celle qui, lorsqu'il était adolescent, était la mère de son copain, sa voisine et son amante, Sylviane Savoyen. Elle avait 53 ans au moment des faits.
Une relation étrange semblait les lier. Elevé par des parents à la main leste, selon une experte psychiatrique, traumatisé par la violence conjugale subie par sa mère et le divorce de ses parents qui s'en est suivi, cet adolescent, décrit par ses soeurs comme très sentimental, gentil mais pouvant être très rancunier, trouve alors souvent refuge dans la famille d'un de ses amis, Jérôme, le fils de Sylviane et de Jean-Marie. « Chaque fois que ça n'allait pas avec ma famille, ils m'aidaient à relativiser. » Très vite, Jean-Marie, avec qui il passe de longues heures à faire de la mécanique, devient comme un père pour lui. Avec Sylviane, les relations sont tout de suite ambiguës. « Quand j'allais manger chez eux, elle me touchait le pied sous la table. Un jour, elle m'a poussé dans la chambre. Elle m'a fait comprendre qu'elle ferait de moi un homme. Plus tard, j'ai compris qu'en fait elle voulait que je lui rende un service. Elle dénigrait son mari. Elle m'a même demandé si je ne pouvais pas le tuer d'un coup de cric. Ça aurait été comme un accident. » Leur relation, émaillée de sévices, selon Mehdi, durera cinq ans, par intermittence. « Elle avait une telle autorité, je ne pouvais pas partir. »
Même séparés, les deux anciens amants continuent de se voir, deux à trois fois par an : « pour se raconter [leurs] misères ». Lors de ces soirées, comme Sylviane, décrite par ses enfants comme une femme acariâtre et égoïste, Mehdi boit beaucoup. Le soir du drame, il vient pour prendre de ses nouvelles. Mais, très vite, la soirée dérape. Au moment, d'après Mehdi, où ils se mettent à parler de Jean-Marie, mort en 2008 d'un cancer du poumon. « Ce soir-là, elle m'a dit comment elle était heureuse qu'il soit mort, ça m'a choqué. Je lui ai demandé si elle était pour quelque chose dans son décès. Elle m'a donné un coup sur la tête pour me rappeler à l'ordre. » Selon Mehdi, elle serait ensuite allée dans la cuisine et en serait revenue avec un couteau.
« Tu ferais mieux de fermer ta gueule, elle m'a dit. Et elle a brandi son couteau. Ça a été un choc. Pour me dégager, je lui ai donné un coup de poing. » Sous la violence du choc, Sylviane tombe à terre. « Elle convulsionnait. J'ai paniqué. J'ai essayé de l'assommer... Je regrette... Je n'étais pas moi-même. Je l'ai frappée avec le couteau. » Il lui assène 33 coups dans les cervicales, le dos et sur les joues. « Quand j'ai appris ce nombre, j'ai été choqué », avoue le jeune homme. Après être resté plusieurs heures à côté de sa victime, qu'il arrose de whisky, Mehdi tente de maquiller la scène du crime à coups d'eau de javel. Il est arrêté un mois et demi plus tard. Son procès se termine ce soir.
Source : Le Parisien