Le policier qui avait tué un braqueur à Noisy-le-Sec en 2012 a été acquitté
Publié le 15 Janvier 2016
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Damien Saboundjian, un policier de 36 ans, jugé pour avoir tué d'une balle dans le dos un malfaiteur armé, a été acquitté ce vendredi par la cour d'assises de Seine-Saint-Denis sous les hurlements de manifestants qui ont crié : «pas de justice, pas de paix». L'avocat général avait requis cinq ans de prison avec sursis et l'interdiction définitive d'exercer.
En début d'après-midi, à 13h45, la Cour d'assises de Bobigny était pleine à craquer pour entendre les derniers mots de l'accusé. «J'ai agi en légitime défense, et j'ai un mort sur la conscience», a dit Damien Saboundjian, à peine audible, à quelques heures de l'épilogue de son procès.
Depuis cinq jours, ce gardien de la paix de 36 ans comparaissait pour «violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner». Toujours policier mais désarmé, il encourait 20 ans de réclusion criminelle pour avoir tué d'une balle dans le dos à Noisy-le-Sec, Amine Bentounsi, fugitif armé, alors qu'il tentait d'échapper à un contrôle de police. La version de l'accusé n'a pas convaincu l'accusation qui a réclamé cinq ans de prison avec sursis mise à l'épreuve, avec une obligation de soins, eu égard à sa «fragilité psychologique», l'interdiction de porter une arme pendant cinq ans — la durée maximum légale — et l'interdiction d'exercer la fonction de policier. «Pour la protection de tous, à commencer par lui-même, sinon à tout moment il peut-être réaffecté sur le terrain» a insisté ce vendredi matin Loïc Pageot, le représentant du ministère public, pour qui la légitime défense n'est pas prouvée.
«La légitime défense ne se présume pas, c'est à [la défense] de le démontrer», a rappelé l'avocat général, comme l'avait plaidé la veille Me Michel Konitz, pour la partie civile. L'accusé s'est retrouvé finalement seul à soutenir qu'il a été braqué à deux reprises. La première fois, au moment où il arrive en voiture, pour «prendre en sandwich» le fugitif. La seconde, lorsqu'une fois sorti de sa voiture, en haut de la rue, le fugitif le braque à 17 mètres de distance. Le policier dégaine et tire quatre fois. «Il y a beaucoup d'incohérences», a estimé l'avocat général, qui ne comprend pas pourquoi le policier n'a pas sorti son arme plus tôt, s'il s'est fait braquer une première fois. Il ne comprend pas non plus pourquoi le fugitif, si, comme le policier le prétend, se retourne dans sa fuite pour le braquer, n'aurait pas réagi en voyant le fonctionnaire dégainer.
«C'est sa version à lui seul, contredite par tous les témoins qui ont vu la scène», a insisté l'avocat général qui pense que le policier a «manqué de discernement, agi dans la panique, avec un stress intense qui a induit des réactions inappropriées». Pour lui, Damien Saboundjian «n'était pas armé psychologiquement pour gérer une situation de stress» et ne doit plus avoir sa place dans la police. «C'est le travail des policiers d'attraper des délinquants mais pas dans m'importe quelle condition, dans le cadre des lois», a insisté l'avocat général, en demandant aux jurés de rendre une «décision qui ne puisse pas être interprétée comme un permis de tuer».
«Face à un individu dangereux, armé sur la voie publique, les policiers devraient se mettre aux abris ? Et attendre de se faire tirer comme des lapins ? Je ne peux pas l'admettre, c'est inacceptable !» a rétorqué Daniel Merchat, l'avocat de Damien Saboundjian, contestant la fiabilité des témoignages. «Ce n'est pas parce que les témoins n'ont pas vu [Amine Bentounsi] braquer Damien Saboundjian que ça ne s'est pas fait», a-t-il dit avant de conclure sa plaidoirie sur «le courage» des policiers, tandis qu'à l'arrière, son client éclatait une nouvelle fois en sanglots.
Source article : Le Parisien