Interview de Valérie Pécresse candidate pour les élections régionales d’Ile-de-France de 2015
Publié le 31 Juillet 2015
Vous pouvez prendre connaissance ci-dessous d’une interview de Valérie Pécresse candidate pour les élections régionales d’Ile-de-France sous l’étiquette Les Républicains parue dans le magazine Le Point. Pour rappel, le scrutin est fixé les 6 et 13 décembre 2015.
La région que vous aspirez à diriger va être de plus en plus en concurrence avec les 12 autres super-régions nées de la réforme territoriale. Comment appréhendez-vous cette nouvelle configuration ?
Valérie Pécresse : Une précision, d’abord : il n’y a pas eu de vraie réforme territoriale ! Elle a fait « pschitt ». Elle était censée simplifier, clarifier le mille-feuilles administratif. Au contraire, elle a débouché sur la loi de l’enchevêtrement maximal des compétences. Mais pour l’instant, nous devons faire avec. Dans les années à venir, il va falloir concevoir le rôle de président de région de manière très différente. Il doit être à la fois entrepreneur et bâtisseur. Une région comme l’Ile-de-France décide de l’usage de 11,5 milliards d’euros par an, dont 6.5 milliards pour les transports. Soit en moyenne 2500 euros par foyer. Avec ces impôts, nous devons faire beaucoup plus pour les Franciliens.
La région dispose de compétences stratégiques : notamment en matière de développement économique, d’emploi, de logement, d’enseignement supérieur, de recherche, de transports, de formation, d’éducation et de culture. A cela s’ajoute l’aménagement du territoire, qui est aujourd’hui négligé. 75% du territoire francilien est rural. 2 millions d’habitants se sentent oubliés. Pour moi, la région est la collectivité qui doit lutter contre les fractures et les inégalités, qui n’ont cessé de croître. L’Ile-de-France est la première terre d’inégalités scolaires, de fractures sociales avec les quartiers-ghettos mais aussi le premier désert médical du pays. Face à ces problèmes, on ne peut plus raisonner comme avant. La gauche a géré la région comme une rente. Il faut raisonner en terme de développement économique, touristique et d’investissements d’avenir. Pour cela, je m’entourerai d’un conseil de chefs d’entreprises françaises et étrangères, y compris de PME. Cette dynamique entrepreneuriale sera au service d’une vision.
Quelle est la vôtre ?
C’est une vision pour l’emploi. Pour certaines régions, il est vital de se spécialiser pour attirer les investisseurs. L’Ile-de-France, elle, peut viser l’excellence dans tous les domaines. Cela passe par une dynamique très forte d’innovation et la valorisation de nos atouts : nous sommes la première région aéronautique et automobile de France : il n’y a aucune fatalité à la désindustrialisation qui nous touche. Nous sommes la première région en matière de recherche (40% du total) : il n’y a pas de raison que les starts up se créent ailleurs. Nous abritons de nombreux sièges européens d’entreprises étrangères, mais la dynamique d’attractivité n’est plus là. Car, notre stratégie n’est pas claire. Elle doit se résumer à : comment créer de la richesse en Ile-de-France ? Nous devons attirer des investisseurs, mais aussi des touristes, et la marque « Grand Paris » doit être le fer de lance de toute l’économie francilienne. Aujourd’hui, l’essentiel du tourisme, c’est Paris, Versailles et Disneyland. Pourquoi ne pas créer une route Napoléon en reliant les Invalides, Rueil-Malmaison, Fontainebleau, Saint-Leu-la-Forêt... ? Pourquoi le projet de cité de la gastronomie autour de Rungis est-il toujours bloqué ? Pourquoi ne pas conforter notre position de deuxième région équestre après la Normandie ? Pourquoi, le Musée de l’air et de l’espace du Bourget est-il sous-utilisé par rapport à ceux de Washington et de Moscou ? Nous avons des ressources incroyables qui sont inexploitées par non-choix et manque de stratégie entrepreneuriale.
Craignez-vous la montée en puissance de super-métropoles régionales qui contestent de plus en plus le leadership de Paris ?
Contrairement à l’Ile-de-France, il est vrai que certains territoires ont su construire une stratégie autour, notamment, de leur fierté régionale. La gauche a transformé la région capitale en robinet de subventions, qui saupoudre des crédits, sans ligne directrice. Ainsi, Lyon, par exemple, en matière de santé est finalement plus lisible que Paris ! Nous ne sommes pas en concurrence avec les autres métropoles françaises mais avec Londres, New-York, Singapour, Berlin, Francfort. Pour cela, nous avons besoin d’un chef d’orchestre qui fédérera les projets, les initiatives et les incarnera. Jamais le Grand Londres n’aurait pu s’épanouir depuis dix ans sans volonté politique. Les maires franciliens se démènent, mais ne peuvent pas réussir seuls. Par exemple, les JO ne seront pas que parisiens et impliqueront toute la région.
Vaut-il mieux être président de région que président de l’Assemblée nationale ?
Les deux fonctions n’ont rien à voir. Le Président de la région doit être pour moi un «faiseux» et pas qu’un «diseux». Quand on est député, on propose des lois, mais la traduction concrète n’est pas immédiate. Aujourd’hui, le rôle d’un président de région devrait être d’accélérer et de simplifier les processus de décision pour libérer les énergies, construire plus vite, entreprendre plus vite. Cela suppose de faire des économies pour investir davantage. C’est pourquoi je souhaite une région sobre et modeste.
De quelle manière ?
Je veux réduire le train de vie. Je propose de déménager la région hors de Paris. Elle est propriétaire de cinq hôtels particuliers, ce qui représente 250 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 26 millions de loyers pour des bureaux attenants, situés dans l’un des arrondissements les plus chers de la capitale. Vous imaginez tout ce que l’on pourrait faire avec ces millions ! Je veux redonner cet argent aux Franciliens. Nous allons donc tout vendre, et nous installer dans le Val-de-Marne ou en Seine-Saint-Denis.
Vaut-il mieux être présidente de région que ministre ?
J’ai fait mon choix : Présidente de région. Si je suis élue, je démissionnerai de l’assemblée et je ne serai pas ministre. Un Président de région qui arriverait à attirer les sièges sociaux, les centres de recherche, les usines, les investisseurs et les touristes, ferait de l’Ile-de-France un des moteurs de la France.