Un homme s’immole par le feu à la Cour du droit d’asile de Montreuil
Publié le 4 Octobre 2014
Sur le trottoir qui fait face à la Cour nationale du droit d'asile, Maria a du mal à retrouver ses esprits. Elle a encore la chair de poule a l'idée d'évoquer ce qu'elle a vu quelques minutes plus tôt. « J'avais rendez-vous pour un recours, on m'avait orienté au 2 e étage et j'attendais là, quand j'ai entendu crier une femme et des enfants, non, non, non. Après, on nous a fait sortir par l'issue de secours, et en bas, j'ai vu le monsieur, allongé par terre. Un monsieur africain, brûlé. » Avec la fumée, la police, les secours, elle a compris que cet homme s'était immolé par le feu et en tremble encore. Une trentaine de personnes ont été évacuées, et toute la cour était sous le choc. L'homme qui s'est immolé était hier encore en vie, mais grièvement blessé. Il s'agit d'un ressortissant tchadien qui, selon nos informations, serait arrivé en France en passant par la Libye.
« Il s'est présenté à l'accueil, voulait des renseignements pour faire réexaminer son dossier, relate Pascal Girault, secrétaire général de la CNDA. Le service d'accueil lui a expliqué la procédure à suivre et à ce moment, pour une raison que je ne saurais expliquer, il s'est aspergé d'essence et a mis le feu à ses vêtements. » La demande de ce Tchadien avait été rejetée par la cour en février. Il y a bien un portique de contrôle à l'entrée du bâtiment, mais on ne demande pas aux visiteurs de vider leurs bouteilles d'eau. L'attente peut d'ailleurs être longue. Le parquet a demandé au commissariat de Montreuil de mener une enquête pour recherche des causes des blessures.
83 % des recours rejetés
Aux portes de la cour, hier, ce geste désespéré faisait surtout écho à la détresse de ceux qui échouent ici. Sur le bâtiment de 4 étages, 350 agents et une centaine de magistrats se côtoient. Près de 600 étrangers arrivent chaque jour de toute la France, pour demander des renseignements, prendre connaissance d'une décision de justice ou plaider leur cause, avec un avocat, après un refus de l'Ofpra (Office français pour la protection des réfugiés et apatrides).
« Ils sont tous dans une situation de stress et d'inquiétude, du fait de leur parcours personnel », admet Pascal Girault. « Les gens qui viennent savent que c'est un peu leur dernière chance de rester en France », insiste un salarié d'un centre d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada), en province. Et les bonnes surprises sont rarissimes : 83 % des recours sont rejetés. « Et l'usine a rejet ne fait que s'accentuer », déplore Gilles Piquois, avocat. Toutes les audiences interrompues hier seront reprogrammées dans les meilleurs délais.
Source : Le Parisien