Les quartiers nord d’Aulnay-sous-Bois sensibilisés au gaspillage alimentaire par la collecte du pain perdu
Publié le 12 Octobre 2014
« Déposez ici votre pain sec pour nourrir les animaux d’une ferme. » Penchée au-dessus d’un vaste container affichant ce message, les mains dans des gants de caoutchouc, Cynthia Roulin, éco-animatrice prévention des déchets, se livre à un tri sans merci. Depuis 8 heures, comme chaque vendredi, la jeune femme est sur le pont, sillonnant avec sa camionnette les quartiers Nord d’Aulnay-sous-Bois (93), pour ramasser le pain rassis ramené par les habitants.
Son circuit compte huit points de collecte situés devant des loges d’immeubles et un centre social. Avec énergie, Cynthia isole les viennoiseries, pizzas et autres tartines qui n’auraient pas dû atterrir là et récupère le pain. « Je note à chaque fois les quantités ramassées », témoigne la coordinatrice de ce dispositif mis en place en 2013, après une expérimentation réussie. En fin de tournée, les sacs seront remis à la ferme d’un centre équestre de Gonesse (95).
Portée par le collectif Mieux vivre ensemble, réunissant trois bailleurs sociaux, la ville, et des acteurs associatifs, l’initiative, soutenue par la Région, est née du constat que les habitants abandonnaient d’immenses quantités de pain au pied des immeubles et de la volonté des partenaires de trouver une solution durable. « Ces jets d’ordures posent pour nous, bailleurs, des problèmes de propreté urbaine et de respect du cadre de vie », souligne Aurélie Lamandé chez le bailleur social Logement francilien.
La mairie a quant à elle pour priorité « de limiter au maximum la production de déchets, pour préserver l’environnement et diminuer les coûts », complète Marianne Liechty, responsable du programme local de prévention des déchets. « Pour beaucoup de familles de ces quartiers, c’est mal de mettre du pain à la poubelle », pointe-t-elle. Ce que confirme Meral Guvel, habitante d’origine turque. « Dans nos cultures, le pain, c’est sacré ! On nous a appris à ne pas le gâcher. Alors, ici, les gens le jettent par les fenêtres pour que les oiseaux en profitent », explique-t-elle.
Mais nourrir les pigeons, c’est risquer de voir leurs fientes salir les façades. Sans compter les problèmes de salubrité. « Le pain attire aussi les rats, les souris, les cafards », constate Daniel Poltorak, gardien à la loge Zéphyr.
Apprendre à moins jeter
L’opération a d’ores et déjà séduit les habitants. « Le réflexe a été pris, remarque l’un d’eux, Youssouf Kamara. Ça fait moins de gaspillage et ça donne une meilleure image du quartier. » De même, les gardiens de la loge France Habitation se réjouissent. « Ici, ça marche super bien ! On ne ramasse plus de pain par terre et les locataires sont satisfaits », assurent Kelly Évrard et Jérôme Froment.
Reste cependant à creuser en amont les raisons d’un tel gaspillage de pain pour le prévenir. « Outre la collecte, j’ai pour mission d’organiser des animations favorisant la réduction des déchets ménagers », résume Cynthia Roulin. Dès avril, à l’aide d’un questionnaire, les habitudes d’achat et de consommation des habitants seront sondées en porte à porte. « L’idée est de repérer les mauvaises pratiques pour les faire évoluer, mais sans discours moralisant », pointe Aurélie Lamandé.
Le ton se veut à l’inverse festif puisque des événements seront proposés dans les quartiers. Au programme : des ateliers cuisine anti-gaspillage, d’échanges de recettes à base de pain rassis… Et un objectif : qu’il n’en reste plus une miette.
Source article : http://www.iledefrance.fr/ Photo : Eric Garault/Picturetank