Le Billet de Veritis

Publié le 9 Décembre 2010

Réforme des retraites, déficits publics et langage de vérité….

 

Il arrive parfois en lisant la presse que l’on tombe sur un article, dont on se dit que l’on aurait pu, à peu de choses près, l’écrire soi-même. Alors pourquoi réécrire d’une autre manière ce qui apparaît limpide et frappé au coin du bon sens ?

 

Je ne résiste donc pas au plaisir de partager avec les lecteurs d’Aulnay libre, dont on me dit qu’ils sont de plus en plus nombreux,  ce petit article écrit sous la plume de Christine Kerdellant, Directrice de la rédaction de l’Expansion , en page 7 du n° de décembre 201O et dont je vous livre, ici, les extraits le plus significatifs.

 

«  La réforme des retraites est entérinée. Sarkozy a-t-il été plus courageux que ses prédécesseurs ? Non, il n’avait pas le choix ».

 

« Si le pays avait reculé, montrant l’incapacité du pays à se réformer, notre dette aurait perdu son triple A et, avec cette bonne note, la capacité à se refinancer à bon prix. Le premier pas vers une situation à la grecque… »

 

«  Il y a longtemps que les cassandres le prédisaient, mais, cette fois, nous y sommes : nos 1650 milliards de dettes publiques – dont les deux tiers détenus par des étrangers – nous mettent à la merci de cette démocratie censitaire que sont les marchés financiers internationaux. Désormais nous sentons tout le poids de « l’insoutenable légèreté de la dette ».

 

« Même les socialistes, s’ils conquièrent l’Elysée, en 2012, ne pourront s’en affranchir. Car, personne n’a oublié mai 1981, les largesses dispensées et le retour de bâton de 1983 : le franc ne valait plus qu’un dixième du dollar, la France courrait à la faillite, le retour de l’orthodoxie s’est imposé. »

 

Puis, elle conclut par ces mots « Même quand ils ont tort, les marchés ont toujours raison ».

 

Quelques commentaires, donc, pour préciser les choses :

 

1.      Comme, chacun sait, la démocratie est le pire des systèmes à l’exception de tous les autres. Mais, les échéances  électorales regorgent de promesses diverses, souvent démagogiques, qui ne servent, la plupart du  temps, qu’à attraper les « gogos ». Mais il est si bon de pouvoir rêver, et de s’imaginer que tout est possible : tout et son contraire ! Voir la réalité en face est souvent plus cruel mais cela éviterait, sans nul doute, des faires des promesses inconsidérées que l’on répand précisément…sans compter.

 

2.      Tous les bons observateurs savent que la réforme des retraites de N. Sarkozy ne finance en réalité que la moitié de l’impasse financière d’ici 2020, le reste ne reposant que sur des hypothèses incertaines (taux de chômage ? taux de croissance ?), le recours au fonds de réserve des retraites et à des mesures fiscales non précisées. Il est vrai, cependant, que le report de l’âge de la retraite de 65 à 67 ans, pour avoir droit à une retraite sans décote, lorsque le nombre d’années de cotisation est insuffisant, peut poser problème dans certains métiers.

 

 

3.      La proposition des socialistes que j’ai étudiée  en détail est habile, mais ne repose pour l’essentiel que sur de nouvelles taxations avec des chiffrages qu’il est impossible de vérifier et une ambiguïté qui, au fond, n’en est pas une : Oui, vous pouvez partir à 60 ans, mais si vous n’avez pas le nombre de trimestres requis vous aurez droit à une décote sévère ! De plus, il est clairement indiqué que le nombre d’annuités de cotisation ne sera pas remis en cause (41 ans aujourd’hui, 41, 5 ans en 2012, 42 ans en 2020). Dés lors, si l’on considère qu’il n’est pas rare aujourd’hui de commencer à travailler vers l’âge de 23 ou 25 ans, on arrive facilement à 65 ou 67 ans. Vive donc la retraite à 60 ans !

 

4.      Par définition, toute dette doit être financée. L’ampleur de la crise financière que nous avons connue en 2008 ont conduit les banques centrales à abaisser leurs taux d’intérêt à court terme dans une fourchette comprise entre 0, 25 % aux Etats-Unis et 1% en Europe. Il s’en est suivi une atténuation sensible des taux longs  ce qui diminue relativement, pour les Etats encore « bien notés », la charge financière liée à la dette publique. Fort heureusement. Mais il se trouve que les budgets étant toujours en déficit, la dette continue de croître et les frais financiers avec. Jusqu’à quand ?

 

5.      Les réalités ont la vie dure. Sauf à ce qu’on puisse considérer que le financement des Etats puisse échapper à la logique des marchés - pour ne pas dépendre d’eux il vaut mieux réduire son déficit, maintenir la dette à un niveau supportable, et surtout la gager par des investissements futurs et non par des dépenses de fonctionnement. On peut toujours demander à tous les niveaux des moyens supplémentaires, des dépenses supplémentaires mais il vaut mieux s’assurer avant que l’on a bien  les moyens d’une telle politique. Par quel miracle, les collectivités pourraient-elles s’exonérer ad vitam aeternam de ce qui s’impose à tout un chacun ? 

 

6.      On peut discuter de la façon dont les banques jouent leur rôle d’intermédiation, mais on ne peut pas oublier quelques règles de base : elles doivent prendre des risques, tout en les surveillant de près et en les couvrant autant que faire se peut ; elles doivent assurer si nécessaire la liquidité des placements de leurs clients qui sont aussi des épargnants ; elles doivent rester solvables afin de garantir le remboursement éventuel des avoirs de leurs clients. Si l’une ou l’autre de ses missions n’est plus remplie, le système se grippe et peut se propager dangereusement à toute l’économie entraînant des faillites en cascade.  Il suffit parfois de peu, d’un grain de sable ici ou là, pour que le système implose  d’autant qu’aujourd’hui tous les systèmes sont interconnectés. C’est la raison pour laquelle les Etats et les banques centrales se sont portés au secours des banques. Sûrement pas pour leurs beaux yeux, mais pour éviter une catastrophe systémique. On peut donc tout à la fois blâmer les banques parce qu’elles sont trop chères, parce qu’elles n’irriguent pas assez l’économie ou parce qu’elles prennent des risques inconsidérés. Mais on ne peut pas vouloir à la fois tout et son contraire. 

 

7.      Il existe des pistes innovantes pour réduire les déficits publics et commencer le processus de désendettement des Etats, mais cela suppose à la fois une Force Unie des Etats  et un rapport des forces suffisamment puissant face aux marchés pour que ceux-ci soient sérieusement encadrés et régulés. Mais à l’heure des simples clics d’ordinateurs et de la libre circulation des mouvements de capitaux qui sont aussi une force permettant d’assurer la mobilité et l’efficacité d’un système d’allocation des ressources, il y faut beaucoup plus que la volonté d’un seul Etat, pour qu’un tel système puisse fonctionner. Deux pistes méritent d’être sérieusement creusées : celle qui conduirait à l’éradication des « paradis fiscaux » qui constituent une source d’évasion fiscale assez phénoménale et une autre qui  conduirait à l’instauration d’un prélèvement à un taux minime ( 0, 05 % par exemple) sur l’ensemble des transactions financières.

 

 

8.       Mais qui aura le courage de s’attaquer à cette montagne colossale d’intérêts coalisés ? Et qui sera capable d’imposer un tel système comportant à la fois les instruments de collecte et de contrôle nécessaires, sans que des dommages collatéraux ne viennent le perturber ? C’est la toute la question de la mise en place d’instruments mondiaux face à la mondialisation des marchés. En clair de l’instauration d’une ébauche de démocratie mondiale face à des marchés mondiaux. Les marchés sont efficaces mais injustes. La démocratie peut être plus juste, mais est impuissante si elle ne s’accompagne pas de la force des marchés. Il faut donc penser à une nouvelle articulation de la démocratie et des marchés à travers une nouvelle dialectique non véritablement explorée à ce jour.

 

9.      Tout cela nous entraîne très loin des petites querelles politiciennes et de ces semi vérités ou semi mensonges qui sont distillées ici ou là, car au fond, à de rares exceptions près, les hommes politiques préfèrent masquer la vérité pour tenter de séduire des électeurs avec de vaines promesses qui se retourneront  fatalement contre eux, car elles ne pourront entrainer que déceptions et désillusions. La démocratie dont je parle est plus exigeante. Elle n’est pas l’ennemie de la vérité. Elle est l’ennemie de la facilité ou de la démagogie.

 

 

Veritis.

 

 

 

 

 

Rédigé par Veritis

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