A Sevran, on ramasse les seringues au petit matin

Publié le 6 Août 2013

sevranseringue.jpgMunis de pinces, les agents des services techniques arpentent la ville pour la nettoyer de ces déchets dangereux laissés par les toxicomanes.

De loin, un bâton de sucette ressemble à s’y méprendre à une seringue. Mais Philippe et Farid ont l’œil. Ils n’ont pas besoin de se pencher, ni même de toucher l’objet du bout de leur chaussure pour en avoir le cœur net. Voilà près de quatre mois que, chaque matin, à Sevran, avant l’ouverture des écoles et des centres de loisirs, ils cherchent les seringues usagées, abandonnées dans les fourrés et les buissons. La société de nettoyage Sepur se charge aussi d’une partie de la ville. Le ramassage des seringues usagées ne date pas du 17 avril, jour où des enfants se sont piqués à l’école Zola. « On travaillait à la collecte des Dasri* depuis mars 2012, explique Abdellah Quossi, directeur du centre technique municipal. A l’automne, on s’est dotés de pinces pour éviter de ramasser ça à la main. Avant on prenait des boîtes au centre municipal de santé pour les y mettre. »

Une cartographie des endroits à risque

Depuis les « événements » d’avril, le ramassage s’est intensifié. Plus de 600 seringues ont été collectées sur les douze derniers jours d’avril, 440 en mai, presque autant en juin, et 140 pour la première quinzaine de juillet. A la ville, quatre agents, dont Philippe et Farid, s’y collent, de 6 heures à 8 heures. Nous les avons accompagnés un petit matin de juillet. Aux abords du centre Poulbot et du centre de loisirs voisin, pas de seringues. L’équipe de ramasseurs n’est pas surprise : « Jamais une seringue n’a été découverte dans la cour d’une des 29 écoles de la ville », assurent-ils. Allongée à même la pelouse, au soleil, une femme dort, en chien de fusil, la tête posée sur son sac à main. Le responsable de la voirie, Abdellah, pense qu’il s’agit d’une toxicomane qui « se repose, après sa prise ». Il s’approche tout de même pour vérifier que la dormeuse n’a pas besoin d’aide.

Des détritus jonchent le sol mais Farid et Philippe s’en désintéressent. Leur boulot, au petit matin, ce sont les seringues, exclusivement. Ici, près du service jeunesse, rien. « Les soirs d’été, il y a des barbecues et en général les toxicomanes s’en éloignent pour faire leur shoot », commentent les agents. La localisation des seringues a été répertoriée sur une carte, et elle répond à une logique assez rationnelle : entre les gares RER et les points de vente (allée La Pérouse, aux Beaudottes ou au Gros-Saule, à Aulnay) et majoritairement dans des endroits à l’abri des regards, derrière le gymnase Bacquet ou sur le mail Victor-Schœlcher. « Il y a quelques points le long du canal de l’Ourcq, note Abdellah Quossi, sous une passerelle, mais ça ne pose pas les mêmes problèmes. »

Un préservatif, une capsule rouge, un flacon indiquent souvent la présence de seringues, comme à la Roseraie, dans un bosquet, où sept seringues sont ramassées. Farid et Philippe les saisissent avec leur pince et les déposent dans la boîte. A aucun moment, les agents ne les touchent de la main. Ils sont capables de dire si la seringue vient du distribox situé à l’entrée de l’hôpital Ballanger ou d’ailleurs. A côté, deux petits vélos rouillés inquiètent Abdellah. Il sait qu’un enfant pourrait être tenté de s’approcher. « Il faudra repasser pour les enlever », dit-il à l’équipe. Ce matin-là, Farid et Philippe ont ramassé une quinzaine de seringues.

*Les déchets d’activités de soins à risques infectieux.

Source : Le Parisien

Rédigé par Aulnaylibre !

Publié dans #C'est dans le Journal

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article