Une cartographie de la drogue en Seine-Saint-Denis va voir le jour
Publié le 27 Mai 2014
La Seine-Saint-Denis va s'inspirer d'une expérience parisienne en matière de drogue et d'addictions qui pourrait bien révolutionner les pratiques. Une simple carte permet, sur un territoire donné, de croiser des informations des policiers, des bailleurs, des spécialistes des addictions, des acteurs qui, d'ordinaire ne se parlent pas.
L'idée ? Avoir une meilleure connaissance des addictions pour mieux y répondre. « On cherche à avoir un état des lieux précis de ce qui se fait sur le département en matière d'actions, de trafic, de consommation », explique Jean-Marc Sénateur, sous-préfet et chef de projet Mildeca en Seine-Saint-Denis, du nom de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.
La démonstration a été faite la semaine dernière, à l'auditorium du Stade deFrance, à l'issue d'une matinée consacrée à ce phénomène. « Vous connaissez Google, ou le GPS pour localiser un endroit précis, un événement ? Et bien ça fonctionne pareil », explique Anastasia Trouvé, qui a mis ses compétences de géographe au service de l'observatoire local des toxicomanies. Celui-ci a été créé il y a quelques années à Paris, par la Coordination toxicomanies, implantée dans le XVIIIe, avec le soutien de la Mildeca et de la Ville de Paris.
L'observatoire croise des données émanant de bailleurs, habitants, professionnels, collectivités, policiers..., avec les informations des spécialistes des addictions (agence de santé, association), mais aussi de l'Insee (institut national de la statistique et des études économiques), qui dispose, par exemple, de chiffres sur les scolaires...
La cartographie permet, par exemple, de savoir quel distributeur de seringues est le plus utilisé, combien de seringues il distribue, combien il en récupère et quel mois il est le plus sollicité.
En effet, les toxicomanes peuvent se procurer une seringue propre dans un automate prévu à cet effet, soit en ramenant une seringue usagée, soit en se procurant un jeton, dans un hôpital. Des jetons de couleur différente, selon les endroits de distribution, ont permis d'illustrer que l'installation d'un automate à un endroit précis ne suscite pas l'implantation d'un nouveau point de deal.
La méthode n'est pas nouvelle. Ici ou là, des initiatives sont déjà menées en Seine-Saint-Denis, mais pas partout et jamais encore à l'échelle du département. Dans la salle où les professionnels de tous horizons sont nombreux, l'intérêt est manifeste. Une professionnelle de Bondy a déjà planché sur le sujet mais se demande si la police communique facilement ses chiffres... « Il faut une volonté institutionnelle mais aussi effectuer un travail de conviction auprès des partenaires », admet Pierre Leyrit, directeur de la coordination Toxicomanies.
Le sujet est sensible et n'importe qui ne peut pas avoir accès à n'importe quoi. Savoir à l'immeuble près, quel numéro de rue est un point de deal peut présenter un intérêt certain, et pas seulement pour les policiers. « Nous sommes très sollicités par les agences immobilières, mais on est très précautionneux », ajoute Pierre Leyrit. La Cnil (commission nationale de l'informatique et des libertés) a son mot à dire et des conventions encadrent les partenariats.
En Seine-Saint-Denis, il faut encore définir le cahier des charges et l'opérateur à même de mener cette expérience. Mais le principe est acté pour 2015.
Source : Le Parisien