Aulnay-sous-Bois : énorme dépôt sauvage sur le site désamianté
Publié le 7 Mai 2013
A peine dépollué, le site de l’ex-usine d’amiante d’Aulnay a été fracturé et des tonnes de terres y ont été illégalement déversées.
« C’était il y a un mois : des dizaines de camions ont amené de la terre pendant toute la matinée. Je me suis dit que c’était pour les besoins du chantier, qu’ils allaient la niveler mais depuis… rien. » Comme beaucoup de riverains de l’ex-usine d’amiante d’Aulnay, le Comptoir des matériaux et des matières premières (CMMP), Roger, 80 ans, propriétaire d’un coquet pavillon de l’impasse Trianon, ne s’est pas vraiment inquiété le 6 avril en voyant une noria de camions déverser de la terre sur ce terrain de 6000 m2. Et pourtant, ce matin-là, à l’aube, soit deux mois après la fin d’un chantier de désamiantage qui aura duré quatre ans, le site du CMMP a été victime d’une incroyable opération commando. Dès l’aube, les gonds du portail principal ont été découpés au chalumeau et environ 1000 t de terre mêlée de gravats ont été illégalement déversées sur les deux tiers du terrain. Une parcelle entièrement dépolluée qui était prête à recevoir, avant l’été, une dalle de béton armé devant servir de bouclier antipollution.
Hier, le maire (PS) Gérard Segura a annoncé avoir porté plainte contre X. Ce matin, il profitera de la visite du préfet dans la ville pour lui demander « de déployer des moyens d’investigation exceptionnels afin d’appréhender les auteurs de ce délit d’une gravité particulière ». L’élu a également demandé à Deltaville, la société d’économie mixte en charge du chantier, de procéder à l’analyse des gravats et de les recouvrir de bâches pour prévenir toute infiltration. Son directeur de cabinet évoque une action très organisée d’un possible « patron pollueur ». « On va demander une vraie enquête de voisinage et des visites des chantiers voisins », souligne-t-il. L’amertume est également palpable chez Jean-Pierre Beckman, architecte et maître d’œuvre chargé de la dépollution du site, alerté il y a une dizaine de jours par la ville qui s’interrogeait sur la nature ces dépôts. « Pour moi, c’est quatre ans de travail saboté : ça me reste en travers de la gorge. Car si ces terres ont été déposées là, c’est qu’elles ont été refusées par des décharges donc qu’il y a risque de pollution. Celui qui a fait ça a pignon sur rue : ce n’est pas le travail d’un artisan. »
Pour remonter sa piste, la ville lancera lundi prochain, via le journal municipal, un appel à témoins. Le collectif des riverains et victimes du CMMP l’a précédée la semaine dernière. Son président, Gérard Voide, a reçu depuis cinq témoignages de voisins du site. « Tous évoquent de nombreuses rotations de camions le samedi 6 avril, entre 5 heures et midi. Certains évoquent même une douzaine de camions en file indienne et un homme en train de faire la circulation au milieu de la chaussée. Mais tous ont pensé à une opération légale. » A l’instar du groupe d’opposition Aulnay-Ecologie qui a exprimé sa « sidération », Gérard Voide s’étonne de l’absence du gardiennage du site et du manque d’information de la municipalité jusqu’à hier. Il entend néanmoins s’associer à la plainte de la mairie en se portant partie civile. « Ces dépôts posent un sérieux problème car ils sont à proximité immédiate de la cour de l’école maternelle (NDLR : qui a rouvert le 18 mars). Sans compter les retards pour le chantier et le surcoût. »
Source : Le Parisien